vendredi 8 novembre 2013

33 Excessif et approximatif, Laurent Jeanneau doit revoir sa copie


Sur un article de Laurent Jeanneau dans Alternatives économiques



 

 
 
 
Dans un récent numéro spécial sur l'état de la France (2014 Les raisons de ne pas désespérer), Laurent Jeanneau publie un article sur l’éducation intitulé « Elitiste et inégalitaire, l’école française devrait revoir sa copie ».  
 
Le début en est tout à fait intéressant.
 
Je cite :
« une petite élite arrive à se hisser jusqu'à l'excellence, au prix d'une sélection féroce à tous les niveaux qui fait de nombreux perdants.
Sociales : en France plus qu'ailleurs, le fait d'être né de parents ouvriers ou enseignants influence les performances scolaires.
Territoriales : du fait de la ségrégation urbaine, certains établissements se ghettoïsent et cumulent toutes les difficultés.
De genre : si les filles réussissent désormais mieux à l'école que les garçons, elles restent exclues des filières scientifiques les plus prestigieuses.
 »
 
 
Il me paraît excessif de parler de sélection féroce à tous les niveaux, comme si tout le système, de la maternelle à l'université fonctionnait sur le modèle des classes préparatoires au grandes écoles.
LJ veut sans doute dire que le niveau moyen exigé est trop élevé. Cela ne justifie pas en tout cas le mot féroce.
 
Il me paraît approximatif, voire absurde, d'écrire : les filles ... restent exclues des filières scientifiques les plus prestigieuses.
Rappelons qu'elles sont désormais admises à l'Ecole polytechnique. Depuis peu de temps, il est vrai : 1973 ou 1974.
LJ veut sans doute dire qu'elles sont sous-représentées compte tenu de leurs performances dans le secondaire. Cela ne justifie pas en tout cas le mot exclues.
 
Qu'est-ce qui autorise un journaliste à produire de tels énoncés ?
 
Comment se fait-il qu'un rédacteur en chef n'intervienne pas pour dire : Hé, p'tit gars, tu ne crois pas que tu y vas un peu fort ? ?
 
Probablement parce que cela est égal à tout le monde médiatique ; le but du jeu n'est pas de chercher des solutions à des problèmes réels, mais de se servir de son droit de rédiger pour se venger des professeurs qui vous ont mis des mauvaises notes durant vos études (mdr). En l'occurrence, à coup sûr à juste titre, étant donné le niveau d'impropriété de votre prose actuelle (lol).
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

mardi 29 octobre 2013

32 Message au Nouvel Observateur (Radier, juin 2013)

La vie et l’œuvre de Véronique Radier : épisode du 20 juin 2013
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Référence : Nouvel Observateur, 20/06/2013, p. 89, article de Véronique Radier, « Abolir l’examen » (texte complet après les messages) 

Messages adressés à : Rédaction, via Courriel
Message du 20 juin 2013
A Monsieur le Rédacteur en chef.
Je viens de lire l'article publié par V. Radier cette semaine.
Je ne comprends pas comment vous avez pu laisser passer ce texte nul et ignoble, torché en 3 minutes (non, j'exagère, en 12 minutes) sur le coin d'une table de café, un texte dont on ne sait pas pour qui il est le plus méprisant : pour les élèves des lycées de ZEP ou pour ceux d'Henri IV.
Manifestement, elle ignore qu'il existe un tas de lycée normaux, ni de centre-ville, ni de ZEP ; elle ignore aussi qu'en série S, il n'y a pas que des « enfants de cadres, de profs » : il y a aussi des enfants de journalistes (je ne dirai pas : "de journaleux", étant respectueux de la langue française).
V. Radier professe une idéologie que j'appellerai bolchévisme scolaire, particulièrement bienvenue dans ce haut lieu de l'extrémisme qu'est le Nouvel Observateur.
Dans ces conditions, la camarade commissaire pourrait-elle expliquer en quoi la suppression du baccalauréat serait un avantage pour les élèves des lycées de banlieue par rapport aux « élèves d’Henri-IV, de Louis-le-Grand ou des lycées de Versailles » ? Ne serait-il pas préférable de supprimer ces derniers établissements et de fusiller « l'aréopage d’agrégés » qui s'y la coulent douce en toute impunité (donnant en plus des « petits cours » grassement rétribués) ?
Salut et fraternité.
Message du 22 juin 2013
A Monsieur le rédacteur en chef.
En complément à mon précédent message, je vous rappelle, et je crois qu'il faudrait le rappeler à la camarade commissaire, que dans « l'aréopage d'agrégés » qu'elle voue à la vindicte du lectorat du Nouvel Observateur, se trouvait, il y a quelques décennies, un certain Jean-Louis Bory, dont le moindre article dans cette publication vaut infiniment plus que la totalité des textes de la camarade commissaire Radier.
Je suppose que ladite camarade ignore qui est Jean-Louis Bory, tout comme elle ignore qui sont Montaigne, Proust et quelques autres.
Jean-Louis Bory avait, entre autres, du style et de l'humour. La camarade commissaire Radier n'a que la haine et le mépris (pour les « cadres et les profs ») pour sous-tendre ses soi-disant analyses du système éducatif français. Elle a parfaitement pris le relais de Caroline Brizard dont les stupides articles m'avaient amené à résilier mon abonnement en 2005.
Je vous invite, Monsieur le Rédacteur en chef, à réfléchir un peu à ce qu'est la rubrique Education du Nouvel Observateur (depuis une dizaine d'années) et à ce qu'elle devrait être : autre chose qu'un tissu d'âneries et de lieux communs ressassés jusqu'à la nausée.
Cordialement.



L’article  « Abolir l’examen »

Il a pour surtitre « 1,5 milliard d’euros pour quoi faire ? » et pour chapeau : « Deux fois centenaire, le baccalauréat est devenu une cérémonie coûteuse, stressante et inutile ».

Texte de l’article


« « Le baccalauréat est, avec la rentrée scolaire, le grand rendez-vous de notre pays avec son système éducatif. Cette année encore, il sera commenté, questionné, critiqué… » badinent Vincent Peillon, le ministre de l’Education nationale, et la ministre déléguée chargé de la Réussite éducative, George Pau-Langevin, en introduction d’un copieux dossier de 53 pages présentant l’édition 2013 à la presse. Effectivement il y a matière à critique. Voici plusieurs années voici plusieurs années que des travaux et ouvrages de recherche pointent l’inutilité, voire la nocivité de cet examen bicentenaire. Et c’est maintenant le SNPDEN (Syndicat national de Personnels de Direction de l’Education nationale qui lui assène le coup de grâce. En compilant différentes données ministérielles, le syndicat livre une estimation qui donne le vertige. En tenant compte des heures de cours perdues et de la mobilisation des locaux, l’organisation du bac général et technologique coûterait au total 1,5 milliard d’euros !
Un milliard et demi pour quoi faire ? Pour mettre en musique une grand-messe républicaine orchestrée cette année encore pour 665 000 candidats et leurs familles. Avec 170 000 correcteurs sur le pont pour corriger 4 millions de copies. Son mérite ? Sauver les apparences, celles de l’égalité républicaine de notre école, censée offrir à chacun les mêmes chances de réussite. Mais cette égalité devant l’examen « impartial » est une fiction et l’anonymat des copies, un leurre. Entre les élèves d’Henri-IV, de Louis-le-Grand ou des lycées de Versailles, dopés aux petits cours, aux séjours linguistiques, chaperonnés par un aréopage d’agrégés, et les élèves des bahuts de banlieue, de ceux où personne ne veut aller, obligés pour certains de bosser les week-ends pour gratter quelques sous, peut-on encore parler d’égalité des chances ?
D’ailleurs, le jour du bac, les dés sont jetés. Les filières sélectives, celles qui offrent les meilleurs débouchés à leurs étudiants, recrutent à partir du dossier scolaire et des bulletins de notes trimestriels de première et de terminale. Et il n’y a pas un bac mais des bacs formant une hiérarchie explicite. Pour les meilleurs élèves, la filière S, un cran au-dessous, ES, le bac L pour une poignée de mordus des lettres et pour les moins brillants. Les bacs techno et pro ne boxent pas dans la même catégorie, puisqu’ils ne mènent qu’à des bac+2. Avec une répartition qui ne doit rien au hasard : on retrouve en bac général et surtout en S – la filière d’élite, seule à ouvrir toutes les portes de l’enseignement supérieur – les enfants de cadres, de profs ; en bac pro et dans une moindre mesure en bac techno, ceux des milieux les plus modestes. Depuis la mise en place du site Admission Post-Bac, dit « APB », les candidats connaissent même leur affectation avant le premier jour des épreuves (dès le 13 juin par exemple cette année). Alors tout ça pour quoi ? Décroché au total par près de 90 % des candidats, le bac revient en somme, a calculé le SNPDEN, à 25 000 euros le recalé, soit plus de deux fois ce que nous dépensons pour la scolarité annuelle de ce lycéen ! « Ces ressources seraient mieux employées à le faire réussir », note le syndicat. Puisse-t-il être entendu ! ».

Note : le rédacteur en chef, qui ne porte peut-être pas ce titre, est, je crois, Laurent Joffrin. Bien entendu, je n'ai pas obtenu de réponse à ces mes messages.





Commentaires

Première approche
L’article se compose de trois types d’éléments : les informations ; les lieux communs ; la rhétorique de Radier, qui leur est superposée.
Les informations concernent 
1) la conférence de presse de Vincent Peillon et George Pau-Langevin 
2) le travail du SNPDEN, au sujet duquel elle se limite à la mention de deux calculs
3) l’existence d’une procédure d’ « admission post-bac ». 
Ces éléments informatifs représentent un tiers de l’article ; le reste est constitué de lieux communs ; en effet, Radier, au lieu de traiter le sujet proposé (l’abolition du baccalauréat), part sur un thème différent : les inégalités devant la réussite scolaire, thème qui permet à sa rhétorique de jouer à fond, bien qu’elle ne soit pas absente de la rédaction des éléments informatifs.


Analyse des informations 

2) le travail du SNPDEN 
On remarquera que Radier n’en fournit ni le titre, ni les références. 
En ce qui concerne les calculs, qu’elle reprend plus ou moins (« coûterait ») à son compte, on peut estimer qu’ils sont sujet à caution :
a) le coût global du baccalauréat 
« En tenant compte des heures de cours perdues et de la mobilisation des locaux, l’organisation du bac général et technologique coûterait au total 1,5 milliard d’euros » : apparemment, ont été additionnées les dépenses effectives liées au bac (rétribution des corrections, des indemnités de déplacement, etc.) et des « manque à gagner (heures de cours non effectuées) ; je ne comprends pas à quoi correspond la notion de « mobilisation des locaux ». 
b) le coût par candidat refusé 
« le bac revient en somme, a calculé le SNPDEN, à 25 000 euros le recalé, soit plus de deux fois ce que nous dépensons pour la scolarité annuelle de ce lycéen » : ce calcul est assez curieux ; dans la logique radiérienne, il serait intéressant qu’il y ait plus de recalés, ce qui permettrait de diminuer le coût unitaire. Le seul calcul fondé serait le coût par candidat, recalé ou reçu. 
D’autre part, il est évident que si on supprimait le baccalauréat, on ne disposerait pas ipso facto de ces 25 000 euros pour chaque recalé, puisqu’ils incluent probablement les dépenses virtuelles mentionnées plus haut.
En conclusion, ces informations ne paraissent pas très sérieuses (en fait, il ne s'agit que d'un prétexte pour lancer sa diatribe habituelle).


A venir : 

Suite des commentaires (note 8 novembre 2013 : la suite des commentaires est en cours d'élaboration)


















lundi 28 octobre 2013

21 Véronique Soulé me saoûle

La vie et l'oeuvre de Véronique Soulé : épisode du 26/11/2012


 
 

 
 
 
 
Référence : Libération, 26 novembre 2012, p. 12-13, Véronique Soulé, « Des Assises pour regarder la réalité en fac »
 
Sujet : Rhétorique souléenne
 
 
 
Prenons le paragraphe intitulé « Surmonter l’échec au cours des premières années » (p. 13).
Que constatons-nous ? Que pour elle, il n’existe pas « l'université », mais « la fac » (sans tenir compte du jeu de mot du titre) ; pas de « classes préparatoires », mais des « prépas » :
« Un tiers seulement des étudiants inscrits en première année de fac arrivent à décrocher leur licence au bout de trois ans »
« Des bacheliers pros se retrouvent en fac de lettres, où ils n’ont pratiquement aucune chance de réussir »
« Des bacs S vont en Instituts universitaires de technologie (IUT) alors que des bacheliers technos se perdent à la fac. »
« pour beaucoup, cela passe par un meilleur encadrement des étudiants, comparable aux prépas »

J’exagère : elle emploie une fois le mot « université » : « l’université, qui ne sélectionne pas, est censée avoir un rôle d’ascenseur social » (bien, la métaphore, je ne l’avais encore jamais rencontrée !).

Notons que, spécialiste de l’éducation à Libération, Véronique Soulé ne sait pas non plus ce qu'est un professeur ; pour elle, il n'existe que des « profs ».

Véronique Soulé écrit comme on parle. Ça me saoule. Pas étonnant que si peu d’étudiants de « fac » arrivent à « décrocher » leur licence.


P.S. Dans le même paragraphe, elle nous dit que :
« les Sections de techniciens supérieurs (STS) qui sont destinées [aux bacheliers professionnels], accueillent des bacheliers généraux. »
Osera-t-on lui signaler que les classes de Technicien Supérieur existaient bien avant, voire beaucoup plus longtemps, que le Baccalauréat professionnel (« Bac Pro ») et qu’elles n’ont pas été créées pour eux ?
Véronique Soulé, qui n’a probablement passé ni le baccalauréat professionnel, ni le baccalauréat technologique (« Bac Techno »), ne se pose pas de problème : comme Geneviève Fioraso l’envisage, il faut « remettre de l’ordre : les pros en STS, les technos en IUT, etc. ».
Mais « cela nécessite des moyens. La ministre a parlé de fermer des masters ayant peu d’étudiants pour dégager des postes pour la licence. Mais les enseignants de ces masters protestent. ». Les tristes sires…
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

dimanche 27 octobre 2013

31 Message à Libération (Soulé, octobre 2013)

La vie et l'oeuvre de Véronique Soulé : épisode du 26 octobre 2013


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Référence : Libération, 26/10/203, Dossier "Des élites pour tous" (pages 1-5)

Message adressé à : Rédaction papier via Libération Contacts

 
Bonjour.

Votre dossier est parfois intéressant, mais dans l'ensemble il fait preuve d'un certain confusionnisme : vous mélangez plusieurs problèmes tels que : le déclin de la culture française (accroche de l'éditorial de Fabrice Rousselot), le caractère uniforme des élites politiques, le mode de formation des élites en général, le problème de la reproduction sociale dans l'école.

A cette absence de problématique, j'ajouterai quelques éléments concernant la rhétorique de Mme Soulé, qui a, encore une fois, réussi à placer une de ses phrases fétiches : "l'école française est la plus inégalitaire dans les pays développés", ce qu'elle semble vouloir démontrer en ajoutant que : "un enfant de famille défavorisée a plus de risque que les autres de redoubler au CP et de décrocher au collège". Désolé, mais cela ne démontre pas que ce soit pire en France que dans d'autres pays : il s'agit seulement d'une explication de ce qu'est l'inégalité scolaire (les lecteurs de Libération, qui ne font pas partie des classes défavorisées, n'ont pas nécessairement besoin d'explications aussi primaires !). Pour ma part, je ne pense pas que la situation soit forcément meilleure pour les classes défavorisées aux Etats-Unis ou en Angleterre, mais je suis prêt à changer d'opinion si on me démontre que j'ai tort.

Donc : Mme Soulé pourrait-elle PROUVER avec des chiffres PRECIS, PERTINENTS et SOURCES son assertion récurrente sur "la France pays le plus inégalitaire scolairement" ? Elle ferait ainsi un vrai travail de journaliste, au lieu de se contenter de son habituel bourrage de crâne.

Cordialement.
 
 
Commentaire
Véronique Soulé, à Libération, représente le versant bête du discours médiatique sur l'école (alors que Véronique Radier, au Nouvel Observateur, en représente le versant méchant, ou plutôt à la fois bête et méchant, mais sans second degré).

Dans l'article, on trouve plusieurs autres assertions intéressantes, notamment celle-ci :

La chercheure Muriel Darmon, qui vient de publier une étude fouillée sur le monde des prépas (Classes préparatoires. La fabrique d’une jeunesse dominante, la Découverte), évoque une «solution utopique» : «On pourrait inverser les publics, mettre les élèves de prépas à l’université et les étudiants en prépa. Les premiers s’en sortiraient très bien en fac, où l’on doit être autonome. Les seconds profiteraient à plein des cours en petits groupes, du suivi des enseignants et des contrôles répétés. Mais c’est difficilement réalisable.»
 
Solution utopique, en effet, puisqu'il y a quelques dizaines de milliers de place dans les classes préparatoire et plusieurs centaines de milliers d'étudiants.
Par ailleurs, cette idée de Muriel Darmon  a des implications que Véronique Soulé, toute à son admiration, n'entrevoit pas : que dans les classes préparatoires, les cours ont parfois lieu à 40 ou 50, que les élèves sont certes harcelés de travail, mais ne sont pas "suivis" à proprement parler (c'est "marche ou crève !", comme à la Légion) et que ce régime ne serait probablement pas apprécié par des élèves qui sortent du lycée avec une certaine nausée des cours à longueur de journée (je précise que personnellement, je ne suis pas un partisan inconditionnel du système des classes préparatoires et des concours à bachotage, qui organise - nécessairement - un gaspillage de travail et d'énergie).
Muriel Darmon et Véronique Soulé envisagent les choses de façon évidemment différente : des classes préparatoires, ou plutôt des classes propédeutiques, qui seraient une extension de l'enseignement maternel au delà du bac : "Alors, mon petit, pourquoi tu n'as pas réussi ton exposé sur la philosophie de Socrate ? Tes corn flakes n'étaient pas de première fraîcheur ?"
L'université (dite "la fac" dans le discours médiatique courant) deviendrait le lieu de rassemblement des meilleurs... et, sinon, on dirait avec honte de ses enfants : "Les cons, ils ont été orientés en prépa !".



Autre article sur Véronique Soulé
*Episode du 26 novembre 2012 : Véronique Soulé me saoûle
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

dimanche 3 février 2013

30 Une métaphore fort spirituelle


Une métaphore (et un article) à l’honneur de la revue Esprit








Référence : François Meunier, « Les multiples facettes du pacte de compétitivité », Esprit, décembre 2012, p. 93-102, notamment p. 97.



Ma lecture de l’article de François Meunier, personnalité favorable à un authentique « choc de compétitivité » pour la France, a été interrompue par la rencontre d’une intéressante métaphore.

Je cite en entier le passage intitulé « Chine ou Allemagne » (p. 97) :

On entend dans la bouche des adversaires du choc de compétitivité le raisonnement suivant : « Pensez donc, il est absurde de vouloir réduire le coût du travail en France : celui de la Chine est dix fois moins élevé. Comment voulez-vous les battre ? Notre seule issue, c’est d’investir dans l’innovation et la productivité. »
C’est un sophisme à détruire absolument. La compétitivité ne se joue pas deux à deux, France contre Chine, ou Allemagne contre Chine, ou France contre Espagne, etc. Il s’agit d’une relation multilatérale qui engage l’ensemble des pays. Si l’Allemagne a une meilleure compétitivité que la France, elle saura compenser l’agressivité chinoise en étant meilleure que la France sur les marchés tiers, c’est-à-dire en lui prenant des parts de marché, y compris sur son propre marché. C’est la parabole de l’ours et des chasseurs. Quand l’ours se retourne et va manger les chasseurs, l’essentiel n’est pas de courir plus vite que l’ours ; c’est de courir un peu plus vite que le chasseur qui court le moins vite.
Le sujet du moment est plus l’Allemagne que la Chine. Il est rageant de lre que le solde agroalimentaire entre l’Allemagne et la France, pays aux atouts agricoles qu’on croyait bien assis est désormais à l’avantage de l’Allemagne.


En ce qui me concerne, je trouve la « parabole » de l’ours et des chasseurs d’une grande délicatesse, d’une grande élévation morale… J’irais jusqu’à dire qu’elle ne peut venir que d’un homme d’Esprit.

Bravo, François Meunier !




Création : 3 février 2013





























dimanche 13 janvier 2013

29 TOUS BARJOTS DERRIERE FRIGIDE BARJOT !


13 janvier 2013 : Manifestation monstrueuse à Paris, France










On ne peut qu’être ému au spectacle des millions de gens qui « sont partis de bon matin, avant le jour, la nuit était comme un four », prenant qui le train, qui le car, pour venir à la capitale proclamer leur attachement aux valeurs familiales et crier : 



« Tous barjots derrière Frigide Barjot ! »

vendredi 11 janvier 2013

28 François George sur Maurice Thorez


Les origines sociales de Maurice Thorez, selon François George







Références :
*François George, Pour un ultime hommage au camarade Staline, Julliard, 1979, chapitre 2, p. 41.
* « Maurice Thorez » dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier


Le livre de François George est dans l’ensemble intéressant et ouvre de large perspectives sur l’interprétation du communisme, mais des assertions discutables lui viennent parfois sous la plume.

Par exemple, dans le chapitre consacré à « La critique de l’amour », il évoque 

...l’idée opportunément exprimée par Maurice Thorez : « Les mères ont fait aimer à leurs enfants le nom de Staline. » Ce n’est pas une simple niaiserie, le « fils du peuple » sait de quoi il parle4 : cela veut dire que la mère, usant du pouvoir qui est le sien en vertu de l’adage latin mater certissima, pater semper incertus, indique à l’enfant l’identité de son père symbolique, autant dire de son vrai père, Staline.
4. Il était lui-même, sur le plan symbolique - le seul qui compte - fils de mineur, c’est-à-dire fils du représentant le plus pur du Prolétaire « en soi » (en fait, il était le fils « illégitime » d’un boucher).

Cette note contient une déformation, à peine sensible, de la réalité, mais qui relève tout de même de la distorsion, volontaire ou involontaire. Quelle impression en tire-t-on en effet ? Celle que Maurice Thorez a menti à propos de ses origines. Au sens strict, François George ne profère pas cette accusation (peu originale) ; mais un lecteur connaissant mal la biographie de Maurice Thorez s’y laisse facilement conduire. Que Thorez ait des tas de choses à se reprocher est une chose ; est-ce une raison pour lui faire en plus ce reproche-là ?

Je propose donc en parallèle un texte élaboré indépendamment de cette controverse :

Le personnage marquant de sa jeunesse fut son grand-père [...], mineur socialiste (guesdiste) de Noyelles-Godault. Embauché à la fosse 4 de Dourges de 1891 à 1914 [...] il était un actif militant [syndical et …] restera jusqu’à sa mort, le 31 avril 1931, l’animateur de la section C.G.T. des vieux pensionnés de Noyelles-Godault. C’est lui qui déclara la naissance de Maurice, enfant naturel que sa fille avait conçu avec Henri Breton, le fils de l’épicier du pays. Refus d’un des deux amants ? Réticences des familles ? La liaison n’avait pas débouché sur un mariage […]. Le jeune Maurice ne connut que tardivement le secret de sa naissance. Il avait en effet été reconnu à 2 ans et demi par Louis Thorez, un mineur qui l’éleva comme son propre fils. Lorsqu’en 1930, Le Populaire fit pour la première fois allusion à ses origines non ouvrières, Thorez répliqua en rappelant que son père Louis Thorez travaillait à la fosse 4 des mines de Dourges depuis 1907 et était syndiqué à la CGTU.

On peut se demander pourquoi François George met illégitime entre guillemets et pourquoi il n’explicite pas la formulation quelque peu ampoulée de sa note. Il aurait pu dire, en somme, si on suit la notice : « Thorez était le fils naturel de la fille d’un mineur et du fils d’un petit commerçant (épicier ou boucher ?) ; il a d’abord été élevé dans la maison de son grand-père maternel, mineur ; il a été adopté par son beau-père, mineur. »

Il ne s’agit pas de quelqu’un qui aurait vécu une enfance petite-bourgeoise, qu’il aurait fait par la suite passer pour une enfance ouvrière. Il a eu une enfance ouvrière dans des familles de mineurs. J’ajouterai que l’expression « Il était […], sur le plan symbolique - le seul qui compte - fils de mineur » est tout à fait inappropriée : une adoption n’est pas « symbolique », c’est un acte de droit parfaitement positif.

Il me semble que François George jette ici sans fondement la suspicion sur les origines de Maurice Thorez et que cela relève d’une rhétorique quelque peu stalinienne (ou, plus généralement, totalitaire), tout à fait injustifiée, même à l’encontre des pires staliniens.

On pourrait aussi s’interroger sur le caractère de « l’accusation » du Populaire, qui me semble relever de l’abjection. Mais je ne dispose pas d’éléments suffisants pour développer se point.

jeudi 10 janvier 2013

27 Un bon plan X


La démocratisation de Polytechnique pour les nuls...







Dans Le Monde du 2 janvier 2013, article de Benoît Floc’h sur le recrutement de l’Ecole polytechnique, « Un coup d’épée dans l’élitisme ».

L’auteur s’ébaubit parce que, de 2007 à 2012, le nombre de boursiers reçus au concours y est passé de 7 à 13 % (après « une pointe à 17 % en 2011 », ce qui n’empêche pas que « le nombre d’élèves boursiers ne cesse d’augmenter ») ; il se désole en même temps d’un résultat très insuffisant, puisque l’université, elle, n’en a pas moins de 35 %.

Un concours républicain, donc injuste 
La faute en revient au fait que « le concours est républicain, c’est-à-dire qu’il traite tout le monde sans faire de différence »*, ce qui est logique dans « un pays passionné par l’égalité »*, mais évidemment ne peut qu’être favorable à la bourgeoisie et autres catégories privilégiées (« A l’Ecole polytechnique, citadelle républicaine qui forme l’élite bourgeoise depuis des lustres […],  le recrutement reste socialement très déséquilibré. »).

Benoît Floc'h est « vraiment révolutionnaire » 
On constate donc que Benoît Floc’h n’hésite pas à faire l'apologie de la haine de classe et à prêcher la remise en cause de tous les privilèges. 
Qu’on se rassure : les lecteurs du Monde font partie des catégories sociales qui alimentent l’Ecole polytechnique avec leurs rejetons, donc, les risques d’embrasement restent limités.

Pourquoi pas moi ?
Ce qui est désolant dans cet article, ce n’est pas sa double pensée, mais l’incapacité de l'auteur à traiter correctement le sujet, à informer véritablement ses lecteurs, par delà une série de lieux communs sans grand intérêt. 
Le fond du raisonnement est absurde : il met en balance « l’Ecole polytechnique » et « l’Université ». Il semble vouloir dire que des boursiers remarquablement doués qui seraient normalement allés à l’Université se seraient, dans ces dernières années, avisés de l’existence de l’Ecole polytechnique, se seraient dit : « Pourquoi pas moi ? » (« Halte à « l’autocensure » ! ») et, last but not least, auraient réussi le concours.

Un conte de fées pour adultes 
Cela relève du conte de fées pour adultes consentants. 
Il est bien évident que des élèves boursiers assez brillants pour être reçus à Polytechnique ne sont pas allés à l’Université : ils sont allés dans une classe préparatoire scientifique, avec une bonne perspective d’être admis dans une école d’ingénieur (sans parler de celles qui recrutent sur dossier). Et pour certains d’entre eux qu’ils ont passé le concours de Polytechnique à côté d’autres concours moins prestigieux. L’alternative n’est pas « Polytechnique/Université », mais « Polytechnique/autre école d’ingénieur ». 

Dans ces conditions, est-ce que la variation du nombre des boursiers reçus à Polytechnique est significative ? Probablement pas. En tout cas, pas sans qu’on dispose des données concernant les classes préparatoires et les résultats des autres écoles d’ingénieurs.

De telles interrogations sont manifestement au-dessous de l’entendement d’un journaliste français spécialisé dans l’éducation. Les siennes (comment mettre fin à l'élitisme) sont beaucoup plus haut de gamme...  

NOTES
* citations approximatives













mercredi 9 janvier 2013

26 Quand Frigide Barjot se met le doigt dans l'...


…œil.






Interviewée par Yannick Urrien dans La Baule+ (n° 106, janvier 2013, p. 4-5), elle déclare notamment (p. 5, colonne 3) :

J’aime trop la communauté homosexuelle pour qu’elle soit demain la vindicte de l’humanité.

La phrase est jugée suffisamment importante pour être reprise comme titre de l’interview (p. 4).

Le chapeau de l’article met les points sur les i :

Elle estime que […] la communauté homosexuelle sera victime d’une grande vague d’homophobie, parce qu’elle sera alors accusée d’être responsable de très graves bouleversements de la société, alors qu’elle n’avait pas du tout demandé cela au départ….

Désolé, Frigide, vous avez tout faux.

Il fallait dire : « pour qu’elle soit demain l’objet de la vindicte de l’humanité ». La phrase reproduite par La Baule+ n’a aucun sens.

Cela dit absolument pas dans le but de discréditer votre beau combat.


Qu’est-ce que La Baule+ ?
Un mensuel gratuit diffusé à la Baule-Escoublac et dans les communes alentours (Guérande, Pornichet, etc.).
Son directeur de publication est Yannick Urrien.
Outre d’intéressantes fiches cuisines concoctées par les chefs locaux et la chronique de l’écrivain local Dominique Labarrière, La Baule+ consiste surtout en interviews de people en séjour à La Baule : personnalités qui, au demeurant, ne sont pas toujours de droite extrême. On peut même y rencontrer des gens de gauche (Joël Batteux, maire de Saint-Nazaire, dans le même numéro), mais c’est rare.
Le courrier des lecteurs vaut aussi d’être lu, pour son choix de missives exprimant la quintessence de l’idéologie baulocentrique.